Lilith » Flow under the moon

Les mains s'enfoncent au fond du blouson, le nez rougit par les rafales de vent se fronce et Alfie s'efforce à marcher à contre-courant, entre la foule qu'il esquive lorsque les épaules s'obliquent d'un côté à l'autre, essaie de ni brusquer ni bousculer mais faut-il admettre que c'est difficile avec un monde pareil.
Il sort d'une réunion avec ses collègues, un truc bancal, un truc emmerdant, un truc qui l'a fait sortir du lit comme si c'était trop important pour ne pas le faire par ordinateur via webcam. Sérieux.
Alors Alfie est légèrement en colère, un peu grognon, il a les linéaments tirés, les lèvres courbées vers le menton et le souffle glacé s'extirpe de la gorge comme des millions de plaintes qu'il n'a jamais su avouer.

Habitué au froid terrible -du moins Alfie pensait l'être mais tous les ans c'est la même chose, les extrémités tremblent, le bonnet bien sur la tête et les mèches qui en rebiquent sur le front : ça ne suffit jamais pour éliminer les morsures du froid.
Alors il se laisse finalement porter par le mouvement de la foule, s'infiltre dans une petite boutique sans en regarder le nom ni la devanture.
Pendant quelques secondes il reste droit comme un piquet, statique, abaisse le regard sur les vêtements -il n'a jamais été shopping, Alfie. Parce qu'il n'en a pas les moyens et que de toute manière, les meilleurs habits se trouvent dans les vieilles friperies cachées aux quatre coins de la ville.
Mais pour aujourd'hui, il préfère jouer le jeu, slalome entre les rayons et s'attarde sur les jeans puis les chemises, les bonnes jusqu'aux vestes.
Sa vieille veste en jean molletonné mériterait une remise à neuf, peut-être d'être changé, alors Alfie prend celle qui lui apparaît sous le nez -beige et il s'empare aussi d'un tee-shirt oversize et lorsqu'il s'apprête à se rendre vers les cabines, il se heurte à quelqu'un.


Il n'a pas vraiment envie de revenir sur l'altercation plus qu'étrange, Alfie ne veut pas s'y attarder, préfère passer directement à autre chose. Alors il regarde par dessus l'épaule de cette dernière, se demande si quelqu'un est venu avec elle en compagnie d'Adam mais cette dernière semble être seule.
Un peu plus à l'aise aujourd'hui qu'entre les quatre murs, Alfie fronce légèrement le nez et laisse le rictus étirer les fossettes des joues jusqu'au menton.


Petite grimace et œillade complice, Alfie ne tiendra pas rigueur de la dernière fois, esquivera le sujet si elle n'a pas envie de le reposer sur le tapis, c'est promis.